UN NOUVEAU PRINTEMPS

PHOTOGRAPHIES DE MARIELLE ROSSIGNOL

Cher·es habitant·es, laissez-nous vous présenter vos voisin·es.

Au cœur de votre ville, à deux pas de la gare SNCF et des arènes,le bâtiment Bruno Brunel abrite 75 résident·es. Tous les jeudis, sur les allées Baroncelli, à quelques mètres de là, il y a un marché. Mais si vous vous y promenez, vous aurez peu de chances de les y croiser.

Cette série vous propose de vous mettre en mouvement et de suivre deux danseuses contemporaines à l’intérieur de Bruno Brunel. Avec elles, le bruit des chariots devient musique, les couloirs deviennent ruelles, les portes des chambres deviennent portes d’entrée, les salles communes deviennent places publiques. Habitantes de la cité, les danseuses traversent cet espace comme on traverse l’espace public. Et rencontrent les résident·es comme elles rencontrent les habitant·es. Sans aucun a priori, sans aucune idée reçue. La rencontre se fait, les préjugés tombent. 

Ici, la mobilité est réduite. Nous sommes au royaume du fauteuil roulant. Mais en y regardant de plus près, en arpentant ces couloirs ornés de fleurs qui se décollent avec le temps, une foule de détails nous invitent à poser un autre regard sur le lieu.

Il y a d’abord Renée que l’on découvre, à demi cachée derrière le mur, que nous avons croisée en arrivant et qui vient de traverser l’établissement pour continuer à nous observer du fond du couloir. Mathilde, couchée dans son lit, dont seul le pied bouge sous la couverture pour marquer le rythme. Il y a aussi Claude, qui demande à poser pour la photo même si le coiffeur n’est pas encore passé. Il y a Rose Marie qui a trouvé ici une seconde famille et l’amour qu’elle mérite. Daniel qui, 30 ans plus tard, relit Les raisins de la colère et parle littérature avec sa voisine de chambre. Il y a enfin Mireille aux cheveux blancs et au regard clair, qui d’un coup se lève et se met à danser, courbée sous le poids des années. Quand la musique s’arrête, elle se met à pleurer. 

Il y a enfin les soignant·es, discret·es et acharné·es, qui arrêtent tout pour observer. Et les animateur·rices, abeilles ouvrières de toute cette vie.

Traverser cet endroit en dansant, c’est découvrir une cité dans la cité. Derrière l’image d’epinal d’un lieu de fin de vie, on découvre un nouvel âge. une nouvelle période où les repères et le rapport à l’espace se redessinent totalement. un nouveau printemps où toutes les histoires et intrigues peuvent s’écrire. 

Cette série raconte la vie. En revanche elle évoque aussi, en filigrane, l’histoire du déclin de la santé publique. D’un lieu aux murs vieillissants dont le dernier pilier semble être l’énergie déployée par une équipe soignante soudée et bienveillante. Un lieu dans lequel l’humain persiste, mis en lumière un instant par le pouvoir de la danse.

Cette série a été réalisée les 26 et 27 avril 2023 sur une commande de la Compagnie Sauf le dimanche. L’exposition a été produite par La preuve par 7 / L’ancienne gare.

Avec le soutien de la Communauté de Communes du Pays de Lunel et la Ville de Lunel.

Remerciements : Le centre hospitalier de Lunel et son équipe d’animation Marjorie, Olivier, Salima et Gallia, la direction, le personnel soignant, les résident·es et leurs familles.
La compagnie Sauf le dimanche : Emilie et Marie.
L’ancienne gare de Lunel et La preuve par 7 : Mathilde.
Merci à Jeanne pour le regard.